Poste de la police aux frontières de Menton pont Saint-Louis (fiche détaillée)

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Adresse 32 avenue Aristide Briand, 06500 Menton
Altitude 38
Date de création du lieu NC.
Les pratiques de privation de liberté ont été constatées dès 2014.
En juin 2015, des constructions modulaires ont été accolées au poste de la PAF de Menton.
Gestion du lieu PAF de Menton, sous la responsabilité de la préfecture des Alpes-Maritimes et de la direction centrale de la police aux frontières, relevant du ministère de l’intérieur.
Dénomination du lieu En mai 2017, il est baptisé de « zone d’attente ». Puis « zone de rétention provisoire pour les personnes non-admises » et d’un « lieu privatif de liberté pour les personnes qui vont être réadmises en Italie ». Depuis 2019, selon la préfecture des Alpes-Maritimes et la direction centrale de la police aux frontières, il s’agirait d’un « local de mise à l’abri ».
Cadre légal Inexistant. Selon la préfecture des Alpes-Maritimes, « il ne s’agit donc ni de locaux de garde à vue, ni de zones d’attente, ni de centres de rétentions administratifs ou de locaux de rétention administrative »
Statut des personnes privées de liberté Non-admises à entrer sur le territoire français.
Acte administratif Refus d’entrée sur le territoire français.
Durée de privation de liberté De quelques minutes à plusieurs heures. À partir de 19h, elles sont enfermées jusqu’à 7h/8h le lendemain matin.
Quelques chiffres Selon le ministère de l’intérieur,
  • Sur les 10 premiers mois de 2020, 22.616 refus d’entrée ont été notifiés au poste de la PAF de Menton soit une moyenne quotidienne de 62 personnes enfermées dans les locaux privatifs de liberté.
  • En 2021, du 1er janvier au 25 février, 4.900 refus d’entrée ont été notifiés avec en moyenne 87 personnes privées de liberté chaque jour.
Description Les locaux de privation de liberté de la PAF de Menton se décomposent en deux espaces : 1 accolé au local de police et 1 situé à l’intérieur du poste.
L’espace accolé est destiné en théorie aux hommes seuls et majeurs, l’espace est constitué de trois modulaires préfabriqués de 15 m² chacun. Des bancs métalliques sont collés aux parois. Il n’y a pas de chaise, pas de matelas, pas de lumière. Un système de climatisation réversible est présent dans les constructions modulaires mais est souvent défaillant. Un autre modulaire, donnant sur la rue, sert de bagagerie. L’ensemble forme un U avec une cour intérieure de 6 m². Trois sanitaires chimiques y sont installés ainsi qu’un robinet d’eau situé au mur du poste de la police adjacent. Il n’y a aucun lavabo. L’ensemble est recouvert d'une grille anti-évasion, fermée à clé et sous vidéo-surveillance. Des détecteurs de mouvement situés à l’extérieur du poste de la PAF et des projecteurs situés dans la rue éclairent jour et nuit la cour. La cour est fermée à clé et sous vidéo surveillance.
Un autre espace est situé dans l’enceinte du poste de la PAF de Menton, utilisé pour les femmes, les enfants et les familles. Il s’agit d’une pièce d’environ 30 m² comportant des bancs en métal et est équipée d’un WC à la turque et d’un point d’eau avec une vasque en inox. La salle, située dans l’enceinte du poste de police, est fermée à clé et sous surveillance vidéo.
Capacité d’accueil Selon la préfecture des Alpes-Maritimes, en ce qui concerne le premier espace 60 personnes peuvent s’asseoir sur les bancs métalliques. Plus de 100 personnes ont pu être enfermées en même temps. Une délégation de la CNCDH ayant effectué une visite des locaux en 2018 témoigne que : « La PAF a expliqué qu’en cas d’afflux important, il pouvait y avoir jusqu’à 40 personnes par bloc modulaire, ce qui porte à plus d’une centaine le nombre de personnes pouvant rester dans cette cour de petite taille ».
Selon les services de la PAF de Menton, la « salle d’attente » pourrait accueillir jusqu’à 30 personnes. Selon les services de la CGLPL, au regard de la taille des bancs, seules 6 personnes seraient en mesure de s’asseoir dans la salle.
Évolution des locaux
  • Dès 2014, les associations locales ont constaté des pratiques de maintien de personnes alors en procédure de réadmission vers l’Italie sur la voie publique, à côté du poste de la PAF Menton, derrière des bâches vertes. Ces personnes n’avaient accès à aucun point d’eau, aucun sanitaire, aucun repas. Ce maintien pouvait durer plusieurs heures. Dans un premier temps, une salle a été utilisée pour le maintien de ces personnes au sein du local de police (salle désormais nommée « salle d’attente »). Mais cette salle ne permettait pas de maintenir l’ensemble des personnes en attente de réadmission en Italie.
  • En juin 2015, les constructions modulaires ont été installées. Cet espace était alors composé de deux constructions modulaires et de sanitaires chimiques.
  • En septembre 2017, des bancs métalliques et la climatisation réversible ont été installés. Une collation consistant en des madeleines et une bouteille d’eau par personne a également été mise en place. Un dispositif de nettoyage a également été prévu, sur le papier, à partir de ce moment.
  • En septembre 2018, les services du CGLPL ont constaté que l’aménagement des locaux avait peu évolué, les investissements ayant servi avant tout à la sécurisation des locaux et non à l’amélioration des conditions de vie. Les services de nettoyage ainsi que les fournitures de repas demeuraient aléatoires. Ainsi, le rapport constate l’absence des équipements élémentaires (éclairage, couvertures, kits hygiène, matelas, chaises, climatisation fonctionnelle, etc.).
  • En novembre 2018, les représentants du comité de prévention de la torture (CPT) du Conseil de l’Europe ont conclu que les conditions d’enfermement dans ces locaux pouvaient porter atteinte à la dignité des personnes.
Accès des avocats, associations et journalistes Non.
Aux côtés de Médecins du Monde et accompagnée par d’autres associations, l’Anafé a saisi, fin 2020, les juridictions administratives pour y avoir accès. Les juges des référés du tribunal administratif de Nice ont enjoint au préfet de permettre aux associations d’y accéder. Le préfet a prévu des modalités particulièrement restrictives (demande préalable, une fois par semaine à dix heures dans un local attenant) qui réduit à néant la possibilité de visiter les lieux.
Accès des parlementaires et AAI Des élus ont pu avoir accès à ces lieux d’enfermement entre 2017 et début 2019.

« Les personnes migrantes interpellées sont amenées à la PAF et retenues contre leur volonté dans les locaux qui comportent deux espaces : d’abord des blocs en préfabriqué vides (intérieur métallique sans aucun meuble ni chauffage) disposés dans une cour fermée couverte par un grillage. Des WC sont accessibles dans la cour. Le second espace est une petite salle fermée à clef qui se trouve dans le bâtiment à proximité de l’accueil de la PAF. Elle comporte des bancs, un WC et un point d’eau. » Compte rendu de Michèle Rivasi, Guillaume Gontard, Myriam Laïdouni-Denis, visite de la PAF de Menton, 31 mars 2018.


Fin 2019 et début 2020, plusieurs élus français se sont vu opposer un refus d’accès aux locaux sur la base d’une note interne de la DCPAF du 2 mai 2019, que les élus n’ont pu avoir communication qu’en mai 2020. Elle comporte un paragraphe dédié aux « locaux de non-admission – locaux de mise à l’abri » visant le « cas particulier de la PAF Menton et Montgenèvre » : « Les locaux de non-admissions – locaux de mise à l’abri : cas particuliers de la PAF Menton et Montgenèvre. Pour les PPA routiers, il n’y a pas de possibilité de création d’une zone d’attente. En période de RCFI, après la non-admission la personne est réacheminée de l’autre côté de la frontière. Cependant, il se peut que le réacheminement soit retardé, tout particulièrement, lorsque les conditions climatiques sont mauvaises. D’où l’utilisation de locaux de mise à l’abri, permettant de préserver la sécurité des migrants. Ces locaux sont des « zones de mise à l’abri », validés par la jurisprudence. Il ne s’agit ni de locaux de garde à vue ou utilisés pour la RVDS, ni de CRA, LRA ou ZA. Ces locaux n’entrent donc dans aucun cadre juridique de droit de visite des parlementaires. Ceux-ci doivent donc formuler une demande préalable auprès de la DCPAF et de la Préfecture concernée s’ils sollicitent une visite. Cette demande fera l’objet d’une double validation. »
Seules des autorités administratives indépendantes et instances européennes ont pu accéder à ces locaux (CGLPL, CNCDH, CPT notamment).